Valeurs Actuelles n° 3630 paru le 23 Juin 2006 | |
Le débat dépassé Plus de 15 % des jeunes de 17 ans fument plusieurs joints par semaine. Aujourd’hui, les effets nocifs du cannabis sont démontrés. Cela ne fait plus sourire grand monde. | |
Ils étaient nombreux, il y a trente ans, à signer l’“Appel du 18 joint” pour la légalisation du cannabis, de Bernard Kouchner ou Alain Geismar, au cinéaste Bertrand Tavernier et au patron de Charlie Hebdo, Philippe Val, en passant par les actrices Bernadette Lafont et Isabelle Huppert ou les philosophes André Glucksmann et Gilles Deleuze. Aujourd’hui, le Collectif d’information et de recherche cannabique (Circ) a perdu le soutien des têtes d’affiche de la gauche soixante-huitarde et peine à trouver des relais dans le monde politique et intellectuel. Cela dit, le texte de 2006 appelant à la dépénalisation a recueilli quelques 3 000 signatures. On y trouve, côte à côte, des locomotives de la jet set, comme Frédéric Beigbeder, des trotskystes purs et durs estampillés LCR, comme Olivier Besancenot, ou des Rouges passés au Vert comme Alain Lipietz et Jean-Luc Bennahmias ou encore des égarés tels le conseiller régional UMP, Jean-Luc Romero. Quant à Malek Boutih, au nom du PS, il propose une « régulation publique », l’État deviendrait producteur et vendeur pour « éviter un marché soumis à la concurrence »… Bref, pas de poids lourd politique, se désespère Jean-Pierre Galland, l’inamovible président du Circ. Leur discours n’a pas changé : « la prohibition a dynamisé le trafic et la consommation », autrement dit, légaliser le cannabis reviendrait à casser le trafic et à faire chuter la consommation. CQFD. Mais la réalité est un peu plus complexe. Les expériences espagnoles et surtout hollandaises contredisent cette affirmation. Dans le premier cas, la consommation a augmenté – même si elle y est moins importante qu’en France – alors que dans le même temps les trafiquants prenaient leurs quartiers au pays des coffee shops. Les partisans du “pétard pour tous” oublient que le “gentil joint” façon seventies a, depuis une quinzaine d’années, cédé la place à une drogue “douce” beaucoup plus… dure : le THC (tétrahydrocannabinol), le principe actif contenu dans le cannabis étant passé d’environ 5 à plus de 35 % comme le nederwiet hollandais, une herbe génétiquement modifié. Les trafiquants ne s’y sont pas trompés : plus la teneur en THC est élevée, plus la dépendance s’accroît en même temps que la demande… et l’offre n’est jamais en retard d’un “pétard”. Chez les fumeurs réguliers (plus de trois joints par jour), a fortiori chez les plus jeunes, le cannabis provoque des troubles de l’attention et des difficultés relationnelles qui peuvent aller jusqu’à la désocialisation. Chez les plus fragiles, des études ont même démontré des risques de schizophrénie, de maniaco-dépression ou d’anxiété. On admet également, aujourd’hui, que fumer du cannabis favorise l’apparition de cancers du poumon et de la bouche car il contient quatre fois plus de goudron que le tabac et il est inhalé plus profondément. Ce n’est pas tout. Chaque année, selon l’OFDT, 230 personnes sont tuées dans des accidents liés à la consommation de cannabis, la moitié étant âgée de moins de 25 ans. Décidément, Mai 68 semble bien loin… | |
Franck Hériot |
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