Dépêche AFP

Réunis vendredi au siège de la Sacem, organisme qui gère les droits d'auteurs générés notamment par ces adaptations en VF, quelque 200 professionnels (sur environ 450 en France) ont dénoncé, dans des débats houleux, la "censure" croissante qui, selon eux, frappe leur travail.
"Nous ne sommes pas contre les contraintes inhérentes à notre travail, lié à des oeuvres de commande", explique à l'AFP Jean-Louis Sarthou, président de la commission de l'audiovisuel.
"Mais depuis une quinzaine d'années, une véritable psychose est née chez nos clients, vis-à-vis de tout ce qui est politiquement incorrect: ils exigent que l'on retire les injures et toute référence à une communauté sexuelle, religieuse, à la drogue, à l'alcool, au tabac, ou à des marques", poursuit-il.
Ainsi, dans la version française d'une oeuvre américaine, on ne boit pas "un Coca-Cola", mais "un soda", deux dealers ne se disent plus "Donne-moi la came", mais "Donne-moi ce que tu sais", explique M. Sarthou.
Lors d'un vif débat vendredi consacré à leur "liberté d'écriture", les auteurs de doublage et de sous-titres invités par la Sacem ont multiplié les exemples de ce qu'ils estiment être un "affadissement des oeuvres originales".
"Pourquoi nous demande-t-on autant de trahir la VO des films et téléfilms américains, alors que dans les films ou les séries françaises les injures ne posent pas problème ?", s'est interrogée une adaptatrice.
Un autre s'est demandé "comment être synchrone en disant +voiture de sport allemande+ à la place de +Mercedes+ ?"
Les diffuseurs des oeuvres exigent fréquemment que des corrections soient apportées à la VF, sans toujours rémunérer ce travail supplémentaire, a-t-on rapporté, des corrections parfois jugées "non motivées" et "arbitraires".
Du côté des chaînes, Sophie Neerman, responsable du service des achats à France 2 et Boualem Lamhene, responsable du doublage chez Buenavista (Disney), seuls présents, se sont défendus d'exiger des VF "édulcorées".
Nombre de voix se sont élevées pour déplorer l'absence, vendredi, d'un représentant du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), pourtant invité, et souhaité que l'institution intervienne en rappelant aux chaînes le cadre juridique existant, afin que celles-ci "ne soient plus dans la psychose, mais dans une crainte raisonnable".
Ils ont aussi interpellé le Centre national de la cinématographie (CNC), souhaitant qu'il réunisse les acteurs du secteur pour "une concertation et la définition de règles claires", une demande à laquelle le directeur juridique du CNC Eric Garandeau, à la tribune, s'est dit ouvert.
Liée à la multiplication des chaînes de TV sur le câble et le satellite, des éditions de DVD et internet qui ont fait exploser la demande, ces dernières années, la crainte du dumping était aussi très présente dans les débats.
Afin de remporter les appels d'offre lancés par les distributeurs, certaines entreprises de doublage et de sous-titrage n'hésitent pas à "économiser sur tous les postes de la chaîne de post-production" pour casser les prix, quitte à délivrer des produits de qualité médiocre, a rapporté M. Sarthou.
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