Dîner avec M…, une copine beurette, membre d’un cabinet ministériel.
Elle est très jolie, ça la chagrine un peu, elle voudrait qu’on prenne en compte ses capacités de femme d’action, pas seulement le velours de ses yeux ou le tour de ses hanches.
Je l’ai consolée en lui peignant les affres des femmes irrémédiablement moches. En outre, elle en a un peu marre d’être la Beurette de service.
Je la comprends. Au gré des modes, elle aura été une “Française issue de l’immigration”. Puis une “Franco-Maghrébine”. Puis une “minorité visible” issue de la “diversité”. Elle préférerait être ce qu’elle est : une Française, tout simplement.
Encore faudrait-il que l’on cessât de courtiser les “minorités”, de les mettre en exergue, de les institutionnaliser.
Sous la plage de la compassion, il y a les pavés d’une discrimination aussi pernicieuse que le racisme ordinaire. Même si elle se veut “positive”.
Chaque Français a des attaches, en Algérie ou en Auvergne. Cessons d’en faire un absolu, un alibi ou un refuge. Nous venons tous d’un terroir plus ou moins géographique ou fantasmatique, et tant mieux : l’ennui, écrivait le poète, naquit un jour de l’uniformité.
Mais cessons de tourner autour de nos nombrils ethniques, confessionnels ou culturels.
On n’“intégrera” personne avec des mesures, sociales ou autres.
Des individus ou des groupes seront happés par les mœurs françaises et l’art de vivre afférent, au fil du temps et au cas par cas. Certains difficilement. Certains jamais.
Le mieux qu’on puisse faire pour les “minorités”, c’est de ne plus les qualifier.
Vouloir “assimiler” coûte que coûte relève d’une arrogance proche du mépris.
En outre ça n’a plus de sens ; ni l’Église, ni l’école, ni l’armée, ni la justice ne sont pourvues idéologiquement pour mettre quiconque au pas et le couler dans un moule.
Finissons-en avec le mythe fumeux d’une “politique d’intégration”. Bornons-nous à exiger le respect des lois.
Rappelons au besoin que les racines spirituelles, esthétiques et politiques de la France sont judéo-chrétiennes et gréco-latines. Si on daignait les arroser sans complexe, les “minorités” finiraient par en prendre acte, et tout le monde s’en porterait mieux.
Il y a vingt-cinq ans, le mot d’ordre des Beurs en panne d’identité était pertinent, ils réclamaient “le droit à l’indifférence”. Depuis lors, on a beaucoup palabré, et régressé à proportion.
Extrait de la chronique hebdomadaire de Denis TILLINAC - Valeurs actuelles du 19 janvier 2007
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