Je reviendrai demain sur les cérémonies qui se sont déroulées ce matin pour le 90 ème anniversaire de l'armistice.
Ci dessous, mon allocution salle Rustic :
En ce 11 novembre 2008, nous sommes ici réunis, afin de commémorer l’armistice du 11 novembre 1918, il y a 90 ans.
Partout en France, dans chaque ville, dans chaque village, nous nous unissons pour célébrer la liberté retrouvée au terme de quatre années terribles, faites de douleur, de larmes et de drames quotidiens.
Presque toutes les familles furent touchées, endeuillées, laissant, là un parent, là un ami, un fils, une fille, un père, disparaître à jamais.
En cette année 2008 qui a vu Lazare Ponticelli, le dernier poilu survivant de la première guerre mondiale, décéder à l’âge de 110 ans. Comme lui, engagé en 1914 à 17 ans, ils furent 8,5 millions de soldats à être mobilisés. 1,4 million, dont de nombreux tirailleurs des colonies, n'en reviendront pas. La plupart avaient entre 18 et 25 ans. Un soldat engagé sur six a été tué pendant le conflit. Alors comment ne pas se souvenir que ce conflit a constitué l’un des terreaux puissants qui fondent une nation dans la profondeur de la douleur puis dans la gloire de la victoire.
Le 11 novembre 1918, à 5h15 du matin, les plénipotentiaires allemands acceptaient les conditions d’armistice du Maréchal Foch. Quelques heures plus tard le Cessez le Feu sonnait sur tout le front mettant un terme à quatre années d’une guerre effroyable.
Dans la clairière de Rethondes, une des plus grandes tragédies du XXe siècle prend fin. Voici ce qu’écrira Foch : « le 11 novembre à 11 heures, le feu était arrêté sur tout le front des armées alliées. Un silence impressionnant succédait à cinquante-trois semaines de bataille. Les peuples pouvaient entrevoir le rétablissement de la paix dans le monde. Le lendemain, le canon tonne, les cloches sonnent à toute volée. Les rues de la capitale sont pavoisées. Le peuple est dans les rues, il fait fête aux nombreux soldats alliés en permission. L’enthousiasme est indescriptible. »
Ainsi s’achève donc cette guerre, après quatre années d’orage de feu et de fer, qui a ravagé les vainqueurs comme les vaincus.
Notre commune elle-même a payé un lourd tribut à celle qu’on pensait alors être la « der des der »
Ils avaient 17, 20 ans, se prénommaient Louis, Gaston, René, Etaient palefreniers, boulangers, bourgeois ou ouvriers et devinrent soudainement artilleurs, fantassins, brancardiers.
Cette guerre se résume aujourd’hui à cette macabre énumération et c’est pourquoi il est plus que jamais nécessaire accomplir notre devoir de mémoire avec recueillement, solennité et respect.
Pour parler de la guerre, il n’y a que des larmes, mais pour la comprendre, il n’ y a que l’espoir. L’espoir que ce monde meilleur, forgé par tant de sacrifice puisse perdurer. Alors, aujourd’hui, en ce 11 novembre, rappelons-nous combien il est important de nous souvenir. Les peuples sans mémoire sont des peuples sans avenir, et les jeunes sans mémoire sont de futurs citoyens sans fondements. Nous sommes c’est vrai ici aussi pour rappeler à chacun, aux plus jeunes en particulier, toute l’horreur de la guerre. Les jeunes esprits, vierges des images atroces des conflits, doivent comprendre que cette guerre n’a pas toujours été cantonnée aux documentaires : elle a réellement existé. Parce que depuis la mort du dernier Poilu, Lazare Ponticelli, nous sommes passés de la mémoire à l’histoire, nous devons nous mobiliser pour que notre jeunesse se souvienne. Cette guerre ne doit pas être seulement figé dans le marbre de ce monument aux morts, mais doit être une mémoire vive…Un dénominateur commun gravé au plus profond de nos cœurs.
Aux jeunes sapeurs pompiers volontaires venus ce matin, à leurs familles, leurs amis, je leurs dis : souvenez-vous. Ces sacrifices, ce sont les vôtres. Ces jeunes gens partis au combat jadis n’étaient pas si différents de vous. Au contraire. Ils vous ressemblaient, rêvaient eux aussi d’avenir, avait soif de défis, était regorgés d’espoirs, mais le vent de l’histoire les a emporté dans un tourbillon de violence et de tristesse infinie.
Je vous invite tous ici présent, à lire ou relire, les différents témoignages existants de ces combattants. Ces poignantes lettres de Poilus; de jeunes appelés au front d’une folie destructrice. Vous y comprendrez la dimension humaine de ce combat, la tristesse de ces destins brisés, de ces familles engagées vert un néant dont ne revient jamais indemne…
Comprendre cet épisode, c’est comprendre également sa société et son avenir, c’est s’engager à combattre pour faire vivre notre république, ouverte et tolérante, fruit du sacrifice de cette génération.
Car cette guerre, au fond, ce 11 novembre reste le symbole d’une victoire. Pas seulement celle de la France et de ses glorieux enfants. C’est à jamais la victoire de la démocratie, la victoire de la paix sur une désastreuse guerre européenne, entraînant une grande partie du monde dans son malheur et sa déraison. Soyons conscients de la fragilité de notre monde qui n’est jamais à l’abri d’un possible retour de la barbarie. L’actualité nous rappelle chaque jour, avec son cortège d’images tragiques, combien les armes, les conflits, les guerres n’ont jamais cessé de résonner, partout dans le monde.
Rêvons ensemble du jour où le retour de la paix ne sera plus seulement, comme l’écrivait Jean Giraudoux, « l’intervalle entre deux guerres », mais plutôt ce que je lis dans vos regards, ce que je devine sur les visages de nos jeunes ici présents : l’amorce d’une paix perpétuelle faite d’engagement citoyen et de tolérance, un idéal de paix guidé par un seul idéal : liberté, égalité, fraternité !